« Droit à l’erreur » : le Gouvernement doit aller plus loin

Lors de la campagne Présidentielle, Emmanuel Macron a clairement annoncé sa volonté de révolutionner les relations des Français et des entreprises avec l’Administration. Pour cela, il veut instaurer un « droit à l’erreur ».

Le Ministre de l’Action et des Comptes Publics a affirmé cet engagement en annonçant très rapidement un projet de loi sur ce sujet.

La simplification, souvent les Gouvernements en parlent. Dans les faits, la réglementation n’a jamais rendu les relations des entreprises et des concitoyens avec l’Administration aussi compliquées. Cette volonté gouvernementale d’instaurer un droit à l’erreur va dans le bon sens. Il est cependant indispensable d’aller plus loin en affirmant le principe de bonne foi en matière de protection sociale complémentaire.

1 – La protection sociale complémentaire est le sujet prioritaire sur lequel des mesures doivent être prises

La protection sociale complémentaire d’entreprise est l’exemple type de l’overdose de complexité dont souffrent les entreprises et en particulier les TPE/PME.

Les principes posés par le législateur relèvent de la quadrature du cercle : assurer une protection sociale identique à tous les salariés, en respectant le principe d’égalité de traitement, et inciter l’employeur à respecter ses engagements tout en préservant un système de protection sociale français à bout de souffle financièrement.

Pour mettre en œuvre les principes généraux posés par la loi, les pouvoirs publics ont laissé à l’Administration le soin d’adapter la réglementation.

Comme le souligne Anna FERREIRA, Avocate au pôle Retraite et Prévoyance d’Entreprise du cabinet FIDAL « Le résultat est édifiant : un texte réglementaire en moyenne tous les 6 mois environ depuis janvier 2012. Cette situation coûte cher à notre pays et ne peut durer. »

2 – Les TPE / PME touchées de plein fouet par cette complexité inutile

Le formalisme exigé est trop contraignant et inutilement coûteux pour les TPE et les PME, frappées de plein fouet par cette complexité liée à des changements permanents :

  • La situation est des plus complexes pour les employeurs qui volontairement veulent améliorer les prestations sociales de leurs salariés. En plus de l’accord de branche, ces derniers devront mettre en place, pour chaque garantie (risques lourds de prévoyance, frais de santé et retraite supplémentaire) :
    • Un contrat d’assurance,
    • Une décision unilatérale,
    • Une notice d’information,
    • Plusieurs accusés de réception,
    • Des bulletins d’adhésion et d’affiliation.

Au total plusieurs dizaines de pages à adapter à chaque entreprise et parfois à chaque salarié selon les options qu’il aura choisies.

  • Si un seul document manque lors d’un contrôle URSSAF, l’agent chargé du recouvrement pourra alors opérer un redressement. En outre, la conformité des contrats santé peut être mise en cause chaque année si l’entreprise ne vérifie pas scrupuleusement si les salariés ayant choisi de ne pas adhérer répondent toujours aux stricts critères qui leur sont imposés.

L’obsession du formalisme devient la règle au détriment d’une démarche pragmatique d’amélioration de la couverture des salariés tout en sécurisant les entreprises.

3 – Le principe de bonne foi doit s’imposer

Le dispositif efficace – et qui ne coûte rien aux Finances Publiques – est de sécuriser les entreprises qui mettent en place des couvertures de protection complémentaire pour leurs salariés. Pour cela, le droit à l’erreur est une avancée mais la présentation qui en est donnée est toujours dans le registre de la sanction. Il ne favorise pas les entrepreneurs de bonne foi par rapport à ceux qui volontairement fraudent à la loi. Le droit à l’erreur s’applique à tous sans distinction, alors que la bonne foi seulement à ceux qui le sont !

Soyons plus positifs et très concrets. Pour cela, 2 mesures techniques doivent être adoptées en priorité :

Mesure 1 : Inscrire le principe de bonne foi du cotisant dans le Code de la Sécurité Sociale

Il s’agit d’inscrire, dans le Code de la Sécurité Sociale, que l’entreprise est présumée être de bonne foi jusqu’à preuve du contraire, cette preuve contraire devant donc être apportée par le contrôleur URSSAF. Ce renversement de la charge de la preuve ne s’appliquerait pas à certains domaines notamment le travail dissimulé.

Mesure 2 : Remplacer la notion de sanction par celle de conseil en cas de première erreur commise. L’entreprise doit disposer d’un délai pour se mettre en conformité lorsque la fraude n’est pas avérée.

En cela je souscris parfaitement au point de vue d’Antoine Montant, Avocat et Directeur du département conseil en droit social chez Fiducial, pour lequel « l’employeur ne doit plus être considéré comme un fraudeur, il convient de lui laisser le temps de la mise en conformité dès lors que la fraude n’est pas avérée ».

Il est essentiel que le Gouvernement intègre prioritairement ces 2 mesures dans le projet de loi en préparation.

La nouvelle approche affirmée par Emmanuel Macron, si elle se traduit par des évolutions concrètes, sera source d’une révolution dans les rapports entre les entreprises et l’Administration et les organismes sociaux.

Si elle se limite à des effets d’annonce, le changement annoncé sera sans lendemain.

Lire le communiqué de presse du 01/06/2017

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