Epargne retraite et année blanche : les Français dindons de la farce !

Certains pensaient pouvoir échapper à l’instauration du prélèvement à la source.

Hélas, l’espoir n’aura été que de courte durée et Gérald Darmanin, Ministre des Comptes Publics, n’aura guère mis de temps à suivre les injonctions de l’Administration des Finances.

Dans quelques jours, ce que l’on appelle « l’année blanche » – qui est plus précisément l’année de transition, au cours de laquelle, un dispositif de crédit d’impôt spécifique « le crédit d’impôt modernisation du recouvrement (CIMR), est instauré, débutera.

L’objectif de ce dispositif est d’éviter une double imposition au titre de l’impôt sur le revenu 2018 avant la mise en place du prélèvement à la source prévu en 2019.

Mais tout se complique quand on examine ce qui va se passe pour la déduction fiscale des cotisations de l’épargne retraite pour 2018 et 2019.

Tel que qu’il est prévu, et malgré les alertes des meilleurs experts de ce sujet – comme ceux de l’Institut de la Protection sociale – le mécanisme ne permettra pas aux versements effectués sur les produits d’épargne retraite (PERP, PREFON, article 83 pour la part facultative,…) d’être déductibles fiscalement.

Deux solutions raisonnables s’offraient aux pouvoirs publics pour maintenir tout ou partie de l’avantage fiscal au bénéfice des Français qui se sont – rappelons-le – engagés à épargner en contrepartie d’une incitation fiscale :

  • corriger le tir en rendant possible la déduction fiscale pour les versements 2018
  • ou reporter cette déduction fiscale sur les versements 2018 en la cumulant avec celle de 2019.

Le 5 décembre dernier, les députés ont adopté un amendement au projet de loi de finances rectificative pour 2017 en retenant une solution alternative :

  • Le texte prévoit que pour l’imposition des revenus de l’année 2019, le montant de cotisations déductible est égal à la moyenne du montant des cotisations versées en 2018 et 2019 à la condition que le montant versé en 2018 soit inférieur à celui versé en 2017 et à celui versé en 2019.

Quelles sont les conséquences de ce texte ?

Pour bien comprendre, illustrons les différentes situations par un cas pratique :

– Le contribuable alimente son PERP de manière régulière à hauteur de 1 000 € en 2017, 2018 et 2019.
–> Il déduira sur 2019, la moitié des versements de 2018 et 2019, soit 1 000 € au total.

– Le contribuable, après avoir versé 1 000 € en 2017, décide de limiter son versement à 500 € en 2018 puis de le passer à 1 500 € en 2019.
–> Le versement 2018 (500 €) est à la fois inférieur à celui de 2017 (1 000 €) et à celui de 2019 (1 500 €). Il pourra déduire sur 2019 (500 € + 1 500 €)/2 = 1 000 €.

– Le contribuable, après avoir versé 1 000 € en 2017, décide d’augmenter son versement pour le porter à 1500 € en 2018 puis de le laisser à 1 500 € en 2019.
–> Le versement 2018 (1 500 €) est supérieur à celui de 2017 (1 000 €) et égal à celui de 2019 (1 500 €). Le mécanisme de la moyenne ne joue pas. Le contribuable pourra déduire 1 500 € sur 2019.

– Le contribuable, après avoir versé 1 000 € en 2017, décide d’augmenter son versement pour le porter à 1500 € en 2018 puis de le baisser à 1 000 € en 2019.
–> Le versement 2018 (1 500 €) est supérieur à celui de 2017 (1 000 €) et à celui de 2019 (1 000 €). Le mécanisme de la moyenne ne joue pas. Le contribuable pourra déduire 1 000 € sur 2019.

– Le contribuable, après avoir versé 1 000 € en 2017, décide d’augmenter son versement pour le porter à 1500 € en 2018 puis de le porter à 2 000 € en 2019.
–> Le versement 2018 (1 500 €) est supérieur à celui de 2017 (1 000 €) et inférieur à celui de 2019 (2 000 €). Le mécanisme de la moyenne ne joue pas. Le contribuable pourra déduire 2 000 € sur 2019.

– Le contribuable, après avoir versé 2 000 € en 2017, décide de porter son versement à 1 500 € en 2018 puis à 1 000 euros en 2019.
–> Le versement 2018 (1 500 €) est inférieur à celui de 2017 (1 000 €) et supérieur à celui de 2019 (1 000 €). Le mécanisme de la moyenne ne joue pas. Le contribuable pourra déduire 1 000 euros sur 2019.

La mécanique est implacable car elle incite les Français à ne pas trop réduire leur effort d’épargne en 2018, année durant laquelle ils ne bénéficieront pas de l’avantage fiscal habituel

C’est clairement l’engagement de confiance qui est atteint et cet état est fort regrettable.

Il ne faut pas oublier que les projets sur 2017 eurent un impact très sensible sur la collecte des contrats Perp et Madelin. Qu’en sera-t-il sur le premier semestre 2018 ?

Affaire à suivre…

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