Epargne salariale et Loi MACRON : quoi de nouveau ?

Le Comité Technique Epargne Salariale composé de Rolland Nino (BDO), Jérôme Dedeyan (ERES), Guy Bonnet (CM CIC), Olivia Rault-Dubois (FIDAL) et Claude Villain (SOREGOR) œuvre depuis des mois au sein de l’IPS à l’amélioration et à la simplification des règles de l’Epargne Salariale.

Ils suivent de près les travaux de l’Assemblée Nationale et Rolland Nino nous fait ici un résumé précis des changements amorcés sur le sujet et des évolutions souhaitables.

Les propositions contenues dans la Loi Macron à propos de l’épargne salariale ont fait l’objet cette semaine d’une première lecture à l’Assemblée Nationale.

Quoi de nouveau ?

1)   Les conseils de surveillance des FCPE passeraient de 50% à 2/3 minimum de représentants de salariés porteurs de part. La discussion parlementaire a enrichi cette disposition d’une date d’effet : les FCPE devront se mettre en conformité lors du 1er conseil de surveillance se réunissant à partir de 6 mois après la promulgation de la loi

2)   Les règlements des FCPE devraient désormais comporter une information sur le type d’entreprises qu’ils financent et pourront détenir des OPCI (Organismes de Placement Collectif Immobilier)

3)   Le PERCO serait largement amélioré :

  • allégé en fiscalité : la taxe destinée au fonds de solidarité vieillesse  de 8,2% sur l’abondement PERCO dépassant 2 300€ (elle rapportait…. 5 petits millions d’€ par an et fait partie des 192 taxes à faible rendement dont on attend la suppression) serait supprimée
  • le forfait social serait abaissé à 16% sur Intéressement, Participation et Abondement PERCO affecté au système de gestion pilotée dont les FCPE investiraient à 7% au moins dans des titres d’entreprises éligibles au PEA-PME
  • et cette gestion pilotée du PERCO serait le choix de placement par défaut à partir du 1er janvier 2016
  • les employeurs auraient la possibilité de prévoir un abondement unilatéral régulier, collectif et uniforme dans le PERCO, non provoqué par un versement du salarié, et plus seulement un abondement d’amorçage
  • Le nombre de jours de congés « monétisables » dans le PERCO en épargne retraite ou logement en l’absence de compte épargne temps passerait de 5 à 10 jours. Ces jours, comme ceux issus d’un CET ne seraient plus inclus dans le plafond de de versement dans les plans d’épargne de 25% de la rémunération brute au titre des versements volontaires et de l’intéressement

4)   L’intéressement versé après le 1er janvier 2016 serait par défaut affecté au PEE et non plus perçu immédiatement. Un dispositif de rétractation serait prévu au démarrage de la mesure pour permettre aux salariés concernés de ne pas être pris par surprise

5)   Les dates de versement au plus tard de la Participation et de l’Intéressement sont harmonisées au dernier jour du 5e mois qui suit la clôture, et les intérêts de retard éventuels, démarrant au 1er jour du 6e mois, seraient harmonisés au TMO (taux moyen des obligations du secteur privé, à date 2,48%) *1,33

6)   Les accords d’intéressement devront prévoir des informations précises sur les modalités d’investissement-notamment par défaut dans le PEE- dans les plans d’épargne

7)   L’obligation de négociation sur la participation au niveau des branches professionnelles qui avait pris fin en 2009 et n’a pas donné d’effets significatifs, serait rouverte jusqu’à fin 2017

8)   Les modalités de conclusion des PEE et des PERCO seraient alignées

9)   Les modalités de modification des PEI (plans d’Epargne Interentreprises) seraient allégées : information des entreprises adhérentes et validité de la modification sauf si plus de la moitié des entreprises adhérentes ne s’y opposent pas

10)   Le livret obligatoire d’épargne salariale ne reprendrait plus que les seuls dispositifs en vigueur dans l’entreprise et non tous les dispositifs d’épargne salariale, et son contenu ferait désormais partie de la base de données économique et sociale tenue à la disposition des instances représentatives du personnel

11)  Les salariés seraient informés obligatoirement dans leur état récapitulatif du statut de prise en charge des frais de tenue de compte de leur PEE ou de leur PERCO après leur départ de l’entreprise : payés par l’entreprise ou prélevé sur leurs avoirs

12)   Le COPIESAS serait consulté avant tout projet gouvernemental de déblocage exceptionnel de l’épargne salariale

13)   Les accords d’Intéressement renouvelables par tacite reconduction le seraient pour 3 ans

14)  Le taux du forfait social passerait à 8% pendant 6 ans pour la Participation et l’Intéressement versés par les PME de moins de 50 salariés mettant en place pour la première fois un accord de Participation ou d’Intéressement après la promulgation de la loi et versant des primes à partir du 1er janvier 2016.

Encore une distance qui reste à parcourir….

Il y a du mieux, mais il faudrait revenir sans relâche sur :

  • La mise à disposition systématique des Plans d’Epargne salariale (PEE puis PERCO après un temps d’apprentissage) dès lors qu’il y a un dispositif de partage du profit (participation et intéressement), sachant que les salariés resteront libres de ne pas épargner leurs primes s’ils le souhaitent. Ce serait une mesure de bon sens, sans coût important pour les employeurs qui ne seraient aucunement obligés d’abonder.
  • L’alignement du PERCO sur les autres dispositifs d’épargne retraite (versements personnels libres des salariés déductibles au titre du plafond épargne retraite en contrepartie d’une fiscalisation de la rente à vie optionnelle à la sortie), pour simplifier et faciliter la transférabilité d’une solution retraite à l’autre en fonction du cycle de vie professionnel des citoyens (statut, carrière, dispositifs rencontrés), qui ne sont plus linéaires.
  • En ce qui concerne le forfait social, ne pas renoncer à réclamer une baisse générale, même limitée de cet impôt qui pénalise les entreprises de toutes tailles qui partagent leurs profits avec leurs salariés. Cette baisse limitée serait compensée en perte de recettes par l’augmentation des primes distribuées par toutes les entreprises, notamment celles qui s’équipent, et serait équitable et sans effet de seuil.
  • A défaut redemander l’extension pour les PME du forfait social réduit à 8% pendant 6 ans aux abondements dans les PEE et les PERCO, de façon équilibrée en délai pour ne pas inciter les PME à décaler leur équipement en 2016, et le rattrapage pour la durée restant à courir des 6 ans de cet avantage pour les PME vertueuses qui auront eu le « malheur » de s’équiper avant la loi au bénéfice de leurs salariés. En effet, les entreprises commencent souvent par s’équiper en plans d’épargne avec abondement avant de passer à l’intéressement ou à la participation. Et dans épargne salariale, il y a « épargne », longue de surcroit, c’est-à-dire finançant l’investissement et la création d’emploi des entreprises. Les arguments de complexité ne tiennent pas : l’épargne salariale est un tout : flux de partage du profit ET instrument d’épargne longue associé !
  • Sur le long terme, il nous semble que l’objectif de simplification n’est que partiellement traité (il y a beaucoup d’autres choses simples à modifier), voire que d’autres sources de complexité apparaissent (3 taux de forfait social, un  nouvel effet de seuil à 50 salariés et 6 ans, un placement par défaut de l’intéressement qui est juste mais traité différemment du placement par défaut de la participation, etc…)
  • Et pour finir, les travaux menés avec l’Institut de la Protection Sociale sur la formule de Participation méritent mieux que le sort que leur ont réservé le COPIESAS et l’INSEE. Ce sujet que nous ne jugions pas prioritaire devient un sujet d’intérêt général compte tenu du mitage de l’assiette de la formule légale par les crédits d’impôt variés et de ses effets de bord. La solution existe, regardons-là sereinement !

Accédez au livre blanc « 9 orientations pour réforme l’épargne salariale » paru en décembre 2014

Partager l'article