La directive sur le détachement des travailleurs : un enjeu majeur

Un an après que la commission européenne a présenté le projet de révision de la directive sur le détachement des travailleurs, le pré-rapport devant servir de base à la discussion au Parlement est maintenant sur la table.

Ce document propose de ne plus asseoir le texte uniquement sur la liberté de prestation de services, et d’inclure explicitement une dimension sociale.  Il soutient également la Commission dans sa volonté d’élargir la définition de la rémunération, afin que chaque État membre puisse y intégrer des éléments tels que le 13e mois ou les primes.

Mais cela risque de demeurer bien timide pour régler la situation.

La partie n’est pas gagnée, tant le terrain semble miné.

En France, plusieurs candidats à l’élection présidentielle, et non des moindres, ont ainsi promis de ne pas appliquer la directive.

Par ailleurs, l’an dernier, les pays de l’Est ont brandi un « carton jaune » pour protester contre le projet de directive, car il prévoit d’aligner les rémunérations des travailleurs détachés sur celles en vigueur dans le pays d’accueil, au motif que la question des salaires relèverait de la compétence nationale.

La révision de la directive de 1996, malgré sa révision en 2014, n’en constitue pas moins une urgence.

Et la question du dumping social est tout sauf un sujet accessoire tant il exacerbe les positions de la population.

En 1996, avec 15 États membres, les écarts de salaires allaient de 1 à 3 alors qu’aujourd’hui, avec 28 États membres, ils vont de 1 à 10.

Pour autant, les propositions contenues dans le projet de rapport s’avèrent modestes au regard de la situation :

  • D’abord, de ne plus asseoir légalement le texte uniquement sur la liberté de prestation de services, et d’inclure explicitement la protection des travailleurs.
  • Ensuite d’élargir la définition de la rémunération, afin que chaque État membre puisse y intégrer des éléments tels que le 13e mois ou les primes.
  • En outre, le pré-rapport souhaite que les travailleurs intervenant par le biais de contrats d’intérim en cascade ne puissent pas bénéficier du statut de travailleur détaché
  • Enfin, il propose de laisser aux États la possibilité de faire appliquer aux travailleurs détachés des conventions collectives régionales ou sectorielles – à condition de ne pas inclure des dispositions estimées discriminatoires, comme la nécessité de parler la langue nationale

Le pré-rapport propose aussi de conserver l’idée qu’un travailleur, après 24 mois de prestation, soit soumis à l’ensemble des règles s’appliquant dans le pays d’accueil – sauf si celles-ci sont moins protectrices.

Mais on n’est bien loin de l’exigence des régimes de protection sociale.

Tant que la règle selon laquelle les cotisations applicables doivent être celle du pays d’accueil ne sera pas introduite, tous les ajustements de la directive sur les travailleurs détachés resteront vains.

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