La protection sociale au cœur du débat Présidentiel

La campagne Présidentielle touche à sa fin.

Dans la dernière ligne droite, la comparaison entre les programmes en matière de retraite et de protection sociale va s’avérer déterminant.

Faisons un tour d’horizon des différentes mesures préconisées par les candidats.

Quelles mesures sur le financement ?

Emmanuel Macron, propose de réaliser 60 milliards d’euros d’économies budgétaires, au sein de l’État (-25 milliards de dépenses), dans l’assurance maladie (-15 milliards d’euros, sans suppression de postes à l’hôpital public mais avec une « réorganisation du système de soins ») ainsi qu’auprès des collectivités territoriales (-10 milliards). Il prévoit également « dix milliards d’économies sur l’assurance-chômage grâce aux réformes structurelles », et souhaite la financer non plus par les cotisations salariales mais par la CSG. Par ailleurs, le candidat propose ainsi un grand plan d’investissement dont 5 milliards d’euros pour la santé. Concernant les charges pour les entreprises, Emmanuel Macron transformerait le CICE en allégement des cotisations patronales.

Marine Le Pen recentrerait le dispositif vers les PME, tout en le transformant aussi en allégement de cotisations sociales. Elle établirait une contribution sociale sur les importations de 3 % et une taxation « à un taux jusqu’à 35 % » des biens produits par des entreprises ayant délocalisé hors de France.

En matière de pouvoir d’achat, Emmanuel Macron souhaite réduire les cotisations payées par les salariés, les indépendants et les fonctionnaires, pour un gain net estimé à 500 euros par an pour un salaire de 2 200 euros net par mois. Il promet également une hausse de la prime d’activité. Marine Le Pen souhaite pour sa part revaloriser les bas salaires.

Quelles évolutions pour les retraites ?

En matière de retraite, Emmanuel Macron veut aller vers un régime unique où chaque euro cotisé vaudra autant de points de retraite, quel que soit le statut du travailleur. L’enjeu n’est donc selon lui plus de repousser l’âge ou d’augmenter la durée de cotisation, mais de « rétablir la confiance » dans le système et de « construire un système adapté au parcours professionnels », et donc de « clarifier et stabiliser les règles du jeu » en mettant en place un « système universel ». Macron part du principe qu’il n’y aura pas de besoins de financement à court terme, même si son projet, qui prévoit en outre que l’espérance de vie soit prise en compte dans le calcul des droits à retraite, fournit un levier important de restructuration financière. Il souhaite « suspendre » le compte pénibilité, qui doit, selon lui, être « adapté » par branche, et intégrer ce critère dans les comptes notionnels.

Marine Le Pen souhaite ramener l’âge légal de la retraite à 60 ans, assorti à une durée de cotisations de 40 ans.

Concernant les petites retraites, l’ancien ministre de l’Économie veut porter le minimum vieillesse au-delà de 900 € (contre 800 euros aujourd’hui).

Marine Le Pen entend, selon les termes de son programme, « revaloriser le minimum vieillesse partout en France, y compris outre-mer, et le conditionner à la nationalité française ou à vingt ans de résidence en France. Autre mesure : elle veut instaurer « une prime de pouvoir d’achat » (PPA) à destination des bas revenus et des petites retraites (pour les revenus jusqu’à 1 500 euros par mois), financée par une contribution sociale sur les importations de 3 %. Enfin, concernant le compte pénibilité, jugé « inapplicable dans sa forme actuelle », elle souhaite le remplacer « par un nouveau dispositif reposant sur une évaluation personnalisée, effectuée par une médecine du travail qui sera reconstituée ». La pénibilité constatée serait compensée par une majoration des annuités de retraite.

Dépendance et Perte d’autonomie

Emmanuel Macron veut valoriser les actions de prévention de la dépendance par « un service sanitaire de 3 mois pour tous les étudiants en santé et une évolution de la rémunération des médecins en ville ». Il entend faciliter le retour à domicile des personnes en situation de perte d’autonomie », soutenir et développer « les solutions d’hospitalisation à domicile et de maintien à domicile pour éviter les hospitalisations inutiles et favoriser le confort des patients les plus fragiles ». Il suggère d’encourager « toutes les formes d’habitat inclusif et partagé, et en particulier l’hébergement intergénérationnel » ainsi que les réseaux d’aide à la personne, et veut « accélérer le décloisonnement entre la ville et l’hôpital d’une part, et les secteurs sanitaire et social d’autre part ». S’agissant des aidants, Emmanuel Macron veut intégrer dans le droit à la formation « un chèque bilan santé/social », proposé au début des situations de dépendance et à période régulière.

Marine Le Pen veut créer « un cinquième risque de sécurité sociale consacré à la dépendance afin de permettre à chaque Français de se soigner et de vivre dans la dignité ». Afin de soutenir les aidants, elle envisage l’octroi d’un trimestre de retraite pour cinq trimestres consacrés à l’aide d’un proche dépendant ainsi que d’un élargissement du droit au répit. Pour développer la silver économie, son programme prévoit la création d’un fonds d’investissement 100 % public en partenariat avec la Banque publique d’investissement.

Quels changements pour l’Assurance maladie

Concernant le financement du système, Emmanuel Macron a indiqué vouloir fixer un Ondam limité à 2,3 % de 2018 à 2022 et réaliser 15 milliards d’euros d’économies par rapport à la courbe de progression tendancielle des dépenses de santé. Une « meilleure gestion » du système de santé, ainsi qu’une politique de prévention santé renforcée seraient les principaux moteurs de ces économies. L’ancien ministre de l’Économie souhaite aussi transférer le financement de ces dépenses vers l’impôt, via la suppression de 3,1 points de cotisations salariales, compensé par 1,7 point de CSG au taux normal.

Marine Le Pen ne fixe pas d’objectif précis pour l’Ondam, mais veut « un remboursement de l’ensemble des risques pris en charge par l’assurance maladie ». Elle souhaite « pérenniser » le financement du système de santé en « luttant contre la gabegie financière et en investissant dans les nouveaux outils numériques pour permettre des économies durables ». La négociation des prix des médicaments, l’augmentation des génériques, ainsi que la vente à l’unité participeraient de cette baisse des dépenses ; mesures qui figurent aussi dans le programme d’Emmanuel Macron. Le Front national se distingue par contre par sa volonté de supprimer l’Aide Médicale d’Etat et d’introduire un délai de 2 ans avant que les étrangers en situation régulière sur le territoire puissent bénéficier des remboursements de l’assurance maladie. Marine Le Pen veut également « rationaliser » le fonctionnement des ARS.

Hôpital et accès aux soins

Concernant l’hôpital, Marine Le Pen veut « maintenir au maximum les hôpitaux de proximité » et augmenter les effectifs de la fonction publique hospitalière. La tarification des établissements serait remise à plat et les GHT réformés, là où Emmanuel Macron veut au contraire accélérer leur développement. Un service de coordination entre la médecine de ville et les hôpitaux serait créé. Emmanuel Macron souhaite pour sa part diversifier les modes de financement des établissements de santé, en réduisant à 50 % au maximum la place de la T2A pour favoriser des financements liés à des objectifs précis et des missions de santé publique et aux parcours ou aux épisodes de soins. L’ancien ministre souhaite également donner davantage d’autonomie aux hôpitaux en diversifiant les modes de rémunération des professionnels et les modes de financement des hôpitaux.

En matière d’accès aux soins, les deux candidats ont pris des engagements pour réduire le reste à charge des Français. Là où Emmanuel Macron promet d’ici la fin de son quinquennat une prise en charge à 100 % sur les dépenses d’optique, dentaire et d’audioprothèse, la candidate frontiste s’engage à « améliorer les soins coûteux ». Les retraités aux ressources modestes et les personnes en ALD seraient également exemptés de franchise médicale. Marine Le Pen souhaite aussi supprimer les plafonnements de garanties introduits par les contrats responsables. Face à la désertification médicale, elle veut aussi relever le numerus clausus dans les études médicales, et financer les téléconsultation au même titre que les consultations physiques. Emmanuel Macron mise quant à lui sur des mesures incitatives, tels que le développement de nouveaux modes de rémunérations et le développement de maisons pluridisciplinaires de santé. Aucun des deux candidats n’est favorable à des contraintes sur l’installation des nouveaux libéraux de santé.

Toujours en lien avec la question du reste à charge, et par rapport cette fois-ci aux organismes complémentaires, les deux candidats, en ayant une approche différente, prônent tous deux un plus grand encadrement des Ocam. Emmanuel Macron souhaite pour sa part peser sur le secteur en imposant des contrats types définis par les pouvoirs publics, censés permettre une baisse des prix. Marine Le Pen souhaite quant à elle interdire aux organismes complémentaires de faire de la publicité, et veut plafonner leurs frais de gestion. Elle est également la seule candidate ayant pris totalement position contre les réseaux de soins, qu’elle souhaite interdire, tandis qu’Emmanuel Macron estime que leur apport peut être positif, s’ils restent sur le mode de réseau ouverts.

Quelle place pour la Prévention médicale ?

En matière de prévention, Emmanuel Macron détaille un programme beaucoup plus fourni que celui du Front national, qui propose essentiellement de revaloriser la médecine du travail, en supprimant aux passages les évolutions engendrées par la loi El Khomri. Emmanuel Macron propose notamment de créer un service sanitaire de 3 mois pour les étudiants en santé, de financer des actions de prévention au titre des missions d’intérêt général dans les établissements de santé et de fixer de nouveaux objectifs de performance pour les médecins libéraux. Il souhaite aussi prolonger la logique du dispositif de sport sur ordonnance introduit sous le quinquennat Hollande, en remboursant le coût des licences sportives pour les personnes en ALD. Il souhaite aussi promouvoir la conclusion d’un ANI favorisant le développement de l’activité sportive dans le cadre de l’entreprise.

Quelle politique pour la Famille ?

En matière de politique familiale, Emmanuel Macron veut « créer un congé de maternité unique garanti pour toutes les femmes quel que soit leur statut aligné sur le régime le plus avantageux ». Il s’engage également à créer une option d’individualisation de l’impôt sur le revenu, et à obliger les communes à publier les communes à publier en ligne leurs critères d’attribution des places de crèche, et à mettre en place systématiquement un système de cotation des demandes.

Marine Le Pen entend revenir sur plusieurs mesures votées sous François Hollande, en proposant ainsi de « rétablir la libre répartition du congé parental entre les deux parents » et de mettre fin à la modulation des allocations familiales. Surtout, elle veut les réserver aux Français. Marine Le Pen promet enfin de rétablir la demi-part fiscale des veuves et veufs, et de défiscaliser la majoration des pensions de retraites des familles nombreuses.

Quel dialogue social avec les partenaires sociaux ?

Emmanuel Macron souhaite redéfinir les rôles respectifs de la loi, de l’accord de branche et de l’accord d’entreprise. Les acteurs de la négociation collective, en particulier les syndicats de salariés, verront leur place renforcée. Les négociations à l’échelle de l’entreprise, ou à défaut l’accord conclu au niveau de la branche, seront privilégiées. Il prévoit de « permettre de négocier au plus près du terrain. Le code du travail définit un socle de droits et de règles (durée légale du travail, salaire minimum, égalité professionnelle…), qui continuera de s’imposer aux entreprises. Au-delà, la primauté sera donnée aux accords d’entreprise sur les accords de branche. Tout accord d’entreprise résultera soit d’un accord majoritaire avec les syndicats, soit d’un référendum à l’initiative de l’employeur ou des syndicats sur la base d’un accord minoritaire. C’est seulement à défaut d’accord d’entreprise que la branche interviendra. L’ancien ministre veut engager une démarche volontariste pour réduire fortement le nombre de branches, avec pour objectif d’en avoir entre cinquante et cent, et créer un code du travail digital pour mieux accompagner les PME dans les décisions qu’elles prennent.

Marine Le Pen souhaite retirer quant à elle la loi travail du 8 août 2016.

Quelle réforme pour le RSI ?

Emmanuel Macron veut supprimer le RSI pour l’adosser au régime général.

Marine Le Pen veut offrir aux indépendants le choix de s’affilier au régime général, le RSI, fonctionnant quant à lui sur la base de l’auto-déclaration trimestrielle des revenus.

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