Les complémentaires santé ne sont pas au bout de leur peine

La généralisation de la complémentaire santé d’entreprise est effective depuis le 1er janvier 2016.

Malheureusement, loin de clore un débat de plus de deux ans, cette réforme, laisse en suspens un grand nombre de questions sur sa mise en pratique concrète. S’ajoutent également les interrogations après l’annonce par le Président de la République d’une extension au champ de la couverture santé des retraités.

L’année 2016 devrait donc être celle de l’épreuve du terrain pour nombre de ces réformes annoncées.

Une généralisation à plusieurs inconnues

Techniquement, la généralisation de la complémentaire santé d’entreprise est effective depuis le 1er janvier 2016. Dans les faits, la mise en place de cette réforme majeure pose encore de nombreuses questions.

Malgré les efforts déployés au cours des derniers mois, une frange des plus petites entreprises s’avoue encore peu informée/concernée par la réforme. Certains sondages montrent d’ailleurs que le niveau d’adhésion à la réforme, tant du côté des entrepreneurs que des salariés, est moindre dans certains types d’entreprises. Cette donnée est importante car plusieurs cas de dispenses d’adhésion existent et peuvent limiter l’impact de la réforme, notamment quand la généralisation de la complémentaire d’entreprise est imposée par le biais d’une DUE.

Pour les branches et les entreprises, cette question des dispenses d’adhésion se double d’incertitudes quant au sort des travailleurs avec un contrat court ou partiel. Inscrit dans la LFSS 2016, le dispositif du chèque santé, prévu pour ces salariés, n’a toujours pas de contours précis, notamment quant à son périmètre d’adhésion.

Quelle place vont prendre les surcomplémentaires ?

De nombreux sondages montrent l’intention pour une grande partie des entreprises jusqu’alors non équipées de favoriser des couvertures proches du panier de soins minimum, avec le risque de provoquer une baisse de couverture pour certains salariés. L’émergence d’un marché de la surcomplémentaire, fait partie des inconnues. Par ailleurs, se pose le caractère ouvert ou captif de ce nouveau marché, puisqu’une surcomplémentaire, si elle est prise chez un opérateur différent, ne bénéficiera pas de la télétransmission avec l’assurance maladie ; ce qui constitue un désavantage compétitif non négligeable.

Quelle généralisation de la couverture santé pour les plus âgés ?

Annoncée par François Hollande en juin 2015, lors du 41e congrès de la Mutualité française, la poursuite de la généralisation de la complémentaire santé, en direction des retraités s’est concrétisée lors de la présentation du PLFSS 2016.

Le dispositif de contrats spécifiques pour les plus de 65 ans a finalement pris la forme d’une labellisation. Mais ses contours, tant au niveau8 de l’encadrement des tarifs que du niveau des garanties, ne sont pas connus, et ce dispositif ne pourrait voir le jour qu’en 2017. Le déséquilibre entre les contraintes du label (notamment une mutualisation plus incertaine doublée d’un encadrement des revalorisations tarifaires) et les avantages (1% de crédit d’impôt, un bénéfice nettement moins incitatif que pour un contrat ACS). A ce stade, l’avenir de ces futurs contrats labellisés semble bien pessimiste.

Par ailleurs, la réforme du dispositif de la loi Evin sur les sorties de contrats collectifs a fait l’objet, au cours des deux derniers mois, de pourparlers entre représentants du secteur et pouvoirs publics. La FFSA comme le CTIP ont mis en garde contre cette piste qui pourrait engendrer une hausse de 15% des tarifs des complémentaires santé d’entreprise et peser sur le passif des entreprises.

Les premières phases de généralisation du tiers payant

Définitivement adoptée dans la Loi Santé, la généralisation du tiers payant reste en réalité suspendue à de nombreuses inconnues pratiques. Pour les assureurs, c’est la crainte du payeur aveugle et anonyme qui mobilise dans l’hypothèse où le dispositif technique retenu se traduirait par une centralisation via l’assurance maladie obligatoire. La Cnamts semblant réticente à cette centralisation, reste ouvert le débat sur la conception technique d’un dispositif à même de répondre aux attentes des patients, des médecins et des assureurs.

Les clauses de désignation : le retour ?

Interdites par le Conseil constitutionnel, par deux décisions de 2013, les clauses de désignation dans les accords de branche santé et prévoyance sont revenues l’an passé à l’occasion du rapport de Dominique Libault, Ce rapport envisage un possible retour à un dispositif de co-désignation en santé, ou même de désignation dans certains cas très spécifiques ou en prévoyance.

Remis officiellement en septembre dernier au gouvernement, ce rapport n’a pour l’heure pas eu de suites officielles. Mais le gouvernement pourrait profiter du renouvellement partiel du Conseil Constitutionnel, prévu début 2016 pour éventuellement reposer le sujet, par voie réglementaire ou législative.

Bref, l’année 2016 risque d’être chaude sur le front des complémentaires santé et prévoyance.

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